Is fecit cui prodest.
Le
phénomène, découvert par des chercheurs, analysé par des experts et disséqué en
talk-shows, est bien connu : tout bruit
de guerre pousse les citoyens à faire des provisions, et dans superettes,
hyper- et supermarchés se presse une foule de ménagères qui, tout en surveillant
sur leur smartphone la progression vers Romorantin de l'aviation ennemie,
emplissent leurs caddies de sucre, café, papier toilette, packs de bière et
caramels durs ( qui font plus d'usage que les caramels mous).
Cette
frénésie d'achat entraîne mécaniquement une hausse globale de la consommation
des ménages qui se traduit à son tour, et tout aussi mécaniquement, par une
hausse de l'indicateur d'efficience gouvernementale nommé PIB.
Cette hausse
du PIB est ensuite annoncée à la télévision , sur les réseaux sociaux et sur www.libertines-affamées.com par le chef de l'Etat, qui se félicite du
succès de sa politique, puis cette même hausse est commentée sur les mêmes
medias par des chercheurs, experts et journalistes indépendants qui – notons la
nuance, preuve d'objectivité –
reconnaissent le succès de la politique du chef d'Etat.
Lequel voit
alors sa cote de popularité dans les sondages inverser sa courbe baissière en
courbe haussière.
Le chef de
l'Etat est content. Il se félicite encore, et trouve surtout que c'est une
bonne idée que d'avoir menacé de bombarder San Marin, la Syrie et Jersey pour
les punir ( il a oublié de quoi ) en laisant entendre que cela pourrair
provoquer une réaction en chaîne.
De leur
côté, spécialistes de la prévision, des prédictions et de divers arts
divinatoires élaborent des scénarios. Dans certains de ceux-ci, il est suggéré
que cette hausse de la consommation pourrait être suivie d'une baisse – dont la
durée sera à peu près égale au temps nécessaire pour les citoyens d'épuiser les
provisions encombrant leurs placards.
Le chef de
l'Etat reçoit une synthèse de ces scénarios pessimistes. Ces conseillers lui
présentent l'alternative qui en découle: a/ subir l'humiliation de l'annonce de
la mauvaise santé du PIB ( "et, hélas monsieur le Président, cela risque
de se produire avant les municipales"); petit b/ : agir , au nom de la
morale, pour que soit déclenchée pour de bon une vraie guerre ("et,
monsieur le Président, cet évènement vous assurera votre place dans
l'Histoire").
Le chef de
l'Etat sait désormais ce qu'il doit faire.
Il y a fort à parier que ce sont bien les mécanismes de prise de décision qui sont à l'oeuvre.
RépondreSupprimerVotre analyse me plait, les guerres relance les économies et pendant que l'on en parle, le reste passe inaperçu.
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